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Les yeux fermés

22/04/2024 1036 visiteurs 7.0/10 (1 note)

Émilie se rend chez ses grands-parents qui organisent une fête pour leur cinquante ans de mariage. Dans les premiers temps, seule en leur compagnie, elle laisse percevoir une jeune fille au visage doux, aux longs cheveux blonds, lumineuse, rieuse voire espiègle. Son comportement change du tout au tout à l’arrivée des convives. Émilie se braque, se replie sur elle-même, devient anxieuse, lorsqu’elle reconnaît son agresseur parmi les invités. Durant ces quelques jours, elle s’interroge : « Maman, qu’est-ce qu’il fout là, lui ? ». La détresse laisse place à l’incompréhension. Alors que la majorité semble être au courant des événements passés, les journées s’organisent autour de jeux, repas et balades, comme si de rien n’était. Cette atmosphère pesante de non-dits amène finalement Émilie à exprimer sa colère, et à enfin prendre la parole.

Dès les premières pages, le ton est donné : sur les murs de la gare figure l'inscription « Mort aux loups ». Le prédateur, de retour dans les Pyrénées, partage les bois avec la biche. Le lecteur fait alors facilement le rapprochement avec l'intrigue et ses protagonistes. Très rapidement dans l’histoire, le visage d’Émilie se ferme et la jeune femme cherche désespérément un interlocuteur à qui se confier. À l’image de la biche dans les bois, elle sursaute à la présence de son agresseur, se terre dans sa chambre. Le soir, la famille semble réunie dans une ambiance festive. Un jeu en apparence anodin comme le Time’s Up confronte toutefois les invités à une situation qu’ils préfèrent taire. « Polanski », « Pédophile », les mots tombent, lourds de sens. Le titre de l’ouvrage prend alors tout son sens : pour combien de temps est-il encore possible de fermer les yeux ? Lorsque la victime trouve enfin le courage de se confier à sa mère, celle-ci lui rappelle la raison de leur venue à tous... une fête familiale. Il s'agit donc de mettre de côté ses émotions pour ne pas ébranler la cohésion du groupe et protéger les apparences. La violence des paroles de sa cousine (« sale balance », « tu détruis la famille ») viennent renforcer cette idée de socle précieux, intouchable qu’est la cellule familiale.
Ce mutisme imposé à Émilie la laisse isolée face à ses souvenirs. Plongée dans un double piège, elle se demande si elle est prête à briser sa famille, celle-là même qui participe à sa propre destruction en l'empêchant de parler. Le retour opéré dans le passé est d'ailleurs facilement perceptible par le jeu de couleurs. Les réminiscences de l’enfance permettent également au lecteur de comprendre les différents traumatismes vécus par les victimes. Au-delà de l’agression, la procédure judiciaire implique de témoigner, revivre les violences, et pose la question de l’accompagnement des proches.
Le lecteur apprend l’identité de l’agresseur assez tard dans le récit. C'est probablement un choix volontaire des auteurs car ce n’est pas l’objet de l'œuvre. Il ne s’agit pas d’une enquête policière, les faits ont déjà eu lieu, le jugement est passé. L’idée ici est d’interroger : est-il envisageable de réintégrer dans l'entourage un violeur qui a été jugé. Est-ce vraiment possible d’oublier ? De tourner la page ?

Le dessin de Valentine de Lussy est doux, parfois imparfait mais sans gêner la lecture. Son trait est presque pudique face à la gravité des propos rapportés, à l’image de l’utilisation faites des ombres qui viennent suggérer les scènes de violences. La dessinatrice s’applique à souligner les émotions des personnages. Cette attention porte le scénario et donne des pistes de lecture, parfois même par de simples échanges de regards.

Alors que l’omerta et les non-dits qui entourent l’inceste en France rendent la prise de parole extrêmement compliquée pour les victimes, Héloïse Martin s’est tournée vers la bande dessinée pour témoigner de l’inceste qu’elle a subi et de la réaction de son entourage. Baptiste Magontier a su l’accompagner dans cet exercice. Avec un traitement délicat, dans une atmosphère pesante de huis clos mais sans jamais tomber dans la lourdeur, il réussit à sensibiliser habilement.

Les yeux fermés est un ouvrage à mettre entre toutes les mains pour aider à une prise de conscience collective de ce fléau et pour faire en sorte que les victimes soient entendues.

Par N. Laskar
Moyenne des chroniqueurs
7.0

Informations sur l'album

Les yeux fermés

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L'avis des visiteurs

    Okojooo Le 26/04/2024 à 15:22:03

    Effectivement, comme l'écrit Jonquille, difficile de reconnaître les personnages à la première lecture, car les visages se ressemblent beaucoup. L'héroïne est dessinée les traits tirés, mais avec ce style de dessin, difficile de voir une différence d'âge entre elle et ses oncles.
    J'ai malgré ces défauts beaucoup apprécié ma lecture, ça change d'avoir un témoignage direct sur l'après jugement, comment la vie continue des années après.
    Cette bd regroupe des souvenirs de plusieurs fêtes de famille, réunies en une seule, pour condenser tous les évènements marquants, on est donc pas sur du 100% vrai, mais tout ce qui y est raconté est, selon Héloïse Martin, vrai.
    Personnellement j'ai ressenti le besoin d'approfondir le sujet, en regardant quelques interviews de l'actrice/ scénariste, car je ne comprenais pas par exemple pourquoi son agresseur avait l'air un habitué des des de famille, alors qu'il avait une interdiction d'approcher de la victime dans son jugement. Il est par exemple précisé qu'il n'a jamais respecté cette clause (sic).
    Comme souvent, les agresseurs continuent de vivre leur vie avec leur famille, et les victimes sont évincées et re-culpabilisées par leurs personnes les plus proches.
    Je mets 5/5 pour le sujet, le ton juste, très humain, l'on ressent les difficultés de chaque personnage tout au long de l'histoire.
    Mais 3/5 pour les soucis de narration, difficulté de reconnaître les personnages au cours de la lecture ce qui rend l'ensemble difficilement compréhensible à la première lecture.

    Jonquille Le 10/04/2024 à 14:24:26

    Je m’en veux de dire du mal d’un album consacré à un sujet aussi grave, aussi essentiel et insuffisamment abordé en bande dessinée. Les exceptions sont rares et les bonnes exceptions encore plus (je pense à "Touchées" de Quentin Zuttion ou "Pourquoi j’ai tué Pierre" d’Alfred et Olivier Ka). Et pourtant, ici, il y avait moyen de faire quelque chose d’original. Certes, on est avec une adulte, qui a été agressée sexuellement quand elle était enfant, mais on est dans le présent. Elle pourrait faire quelque chose. Je dis "pourrait", car les auteurs ont choisi de partir dans des flashbacks au lieu de rendre la protagoniste active dans le présent. Par ailleurs, la symbolique du loup local qui tue des brebis m’a paru bien lourdingue.
    L’autre immense problème est un problème récurrent en BD : la clarté. Je ne sais pas qui est qui, tellement les dessins sont approximatifs, tous les visages se ressemblent, et tellement il y a de personnages. Je n’ai même pas compris qui était le violeur. Au début, je croyais que c’était Pascal. A la fin, je ne suis même pas sûr de savoir qui c’est ! Sur ce problème de clarté, tout est en cause : le graphisme mais aussi le scénario et le découpage. Un cas d’école !
    Autre souci encore : la "stratégie" éditoriale. Je croyais que c’était l’histoire d’Héloïse Martin. D’ailleurs, un autocollant sur la couverture indique : "Le récit poignant de l’actrice Héloïse Martin sur la reconstruction familiale après l’inceste." Sauf qu’en page de garde, Héloïse Martin elle-même dit : "Il y a quelques années, j’ai été invitée à une fête de famille. Voici ce qui aurait pu s’y passer." "Aurait pu" ??? Il faudrait savoir. C’est l’histoire d’Héloïse Martin, oui ou non ? En bas de page, une autre indication : "Si l’histoire est inspirée du vécu et des souvenirs de la scénariste, les faits et personnages présentés dans cet album sont fictionnels." En d'autres termes, l’autocollant de la couverture fait de la publicité mensongère.
    Bref, un ratage sur tous les plans. Le sujet de l’inceste mérite mille fois mieux. 5 étoiles pour le sujet et 0 pour tout le reste (scénario, dessin, édition...) = 1 de moyenne.