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Black Science (Remender/Scalera)

Forum pour discuter de la bande dessinée US

Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede mallrat » 02/03/2018 13:43

Message précédent :
pulpy a écrit:Pour revenir au sujet, il me semblait bien qu'il y avait une fin annoncée par Remender ^^
https://www.cbr.com/interview-rick-remender-black-science-final-13-issues/

Sinon, effectivement pour Marvel et DC, l'ongoing est la norme, sans durée préétablie, pour la plupart des parutions, mais c'est pas aussi systématique dans l'indé. Et bien souvent pour ces séries-là, les auteurs ont au moins la fin en tête, la durée pouvant être plus ou moins longue.


C est ce que je te dis. En indé ils savent qu'il y aura une fin.. ils la connaissent mais ne savent pas la durée.. c est donc une ongoing de toute facon.
Ton lien sur Black Science est vraiment le résumé de tout ce que je dis.
Ils te previennent a peu prés 13 numeros avant (soit a peu prés un an (un peu plus)) que la série s arretera (et encore là ils te donnent une approximation)..

Bref au #1 de black science ou au #6 (si tu fais en TP ou en VF) il n y a aucune chance que tu saches la durée.... c est une ongoing.
Je le disais plus haut: Preacher, Sandman ou 100 Bullets étaient des ongoings.. y compris la derniere qui pourtant était annoncée dés le départ (contrairement aux 2 autres.. puisque j ai fait preacher à l epoque en VO) avoir une fin..

Et c est pas systematique dans l indé mais quand même une ecrasante majorité quand même.
Comme je le disais Cerebus a eu une durée annoncée trés tot mais pas avant le 2 eme ou 3eme recueil (et les recueils sont gros)...
Je prend Kill or Be Killed... le fait que ca ne dure que 4 TP n a pas été annoncé au départ.. pourtant il n y a que 4 TP prévus.
Reprend les solicitations... on t annonce pas #1 (ofXX)
Si on t annonce pas directement la durée au 1.. c est une ongoing quel qu en soit la durée par la suite.

Voilà pourquoi je suis surpris par tant de demande sur ce forum de la durée de séries (souvent alors que le 1 en VF est pas sort).. car dans la majorité des cas de séries US... la durée (et non pas savoir si la série aura une fin) est bien annoncée que 1-2 ans avant la fin max en général (sauf cas comme Cerebus).

Je ne dis pas ni
-Il n y a que des ongoings en comics (mais bien que c est la majorité.. et 2/3 ou 54% de la production, ca reste la majorité)
-Les ongoings ne sont pas annoncées finies (pleins d ongoings sont prévues avec une fin mais qui n est pas programmée clairement)

En fait ce que je dis, c est que si vous voulez savoir à combien de tomes vous vous engagez en comics (il me semble qu en manga c est assez vrai aussi).. il faut attendre qu'elle soit programmée... et en général c est 1 ou 2 ans avant la fin reelle de la série.. donc pas anticipable.

Et encore, il y a les fausses mini séries... Renato Jones.. mais aussi les Hellboys, quelque part les sin city ou 300.. ce sont des minis qui se succèdent... donc la fin réelle.. là aussi on ne le sait qu a la fin (et encore vu qu hellboy continue sous diverses formes)..

Par exemple, Criminal était pensé comme une vraie ongoing (lire les interviews de Brubaker de l'époque par exemple recueillies dans le livre d entretien en VO).. mais il a quitté Marvel (la série était publiée sous le label icons) et s est lancé dans d'autres séries chez image qui se sont révélées mieux vendues par l editeur et plus rémunératrice...
Cependant, criminal peut toujours revenir.... les liens que voulait établir Brubaker entre les personnages et dans le temps sont toujours possibles à faire (ca demande au lecteur de tout relire mais bon..)
Bref.. une série "arrétée" peut etre reprise.. et certaines minis s enchainent telles une ongoing.. Renato Jones va fonctionner en terme de saison.. donc on peut pas dire combien il y aura de tomes exactement, comme un 8eme sin city peut arriver et comme Xerxes peut etre un 300 T2..

Bref et en une phrase, je pense qu'il faut pas se poser ce genre de questions en comics, tu tentes une série.. elle te plait ou pas et durera ce qu elle durera.
Ou alors il faut attendre que la fin soit annoncée mais aprés tu peux te retrouver avec 10 tomes a rattraper...

En tout cas poser al question au premier tome entraînera la plupart du temps peu de réponses certaines.

Sur le sujet principal.. j etais passé à coté de cette interview mais vu que Remender a annoncé un nouveau projet chez image avec Bengal... il faut bien qu'il trouve du temps.. J'attendais plus une fin de Low qui me parait avoir un pitch moins "riche" que Black Science
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede pulpy » 02/03/2018 14:07

Oui, on est plutôt d'accord en fait ^^
Quand il s'agit de mini séries, c'est généralement annoncé dès le départ. Mais entre les minis qui connaissent des suites ou sont prolongées suite au succès ou les séries ongoings arrêtés plus tôt que prévu faute de succès, il est difficile de savoir si on se lance dans des années de lecture ou pas.
Si on regarde le marché actuel (pour l'indé) on a assez peu de titres qui dépassent les 50 issues, mais ça commence déjà à faire dans les 5 ans de publications et l'équivalent de 8 ou 9 tomes si on parle d'édition française.

La chance qu'on a si on lit en français (c'est mon cas) c'est qu'il y a déjà un tri de fait sur les sorties, donc on a pas mal de bonnes séries qui arrivent sur le marche français, et souvent des séries déjà bien avancées aux US, donc a priori on a peu de séries qui sortent en France, à avoir été annulées sauvagement aux US. Mais on peut avoir des éditeurs français qui eux arrêtent la publication faute de ventes.

Mais sinon, lisez Black science, c'est du bon, Scalera est un génie du dessin, et il reste plus que 2 tomes !
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Buckethead » 02/03/2018 14:25

Ah ouais seulement 2 tomes ? Hmm je vais peut être pas revendre les miens alors. Je pensais que ça allait encore durer 3 plombes et attendre les intégrales.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede jb18v » 07/03/2018 10:09

Lu le tome 6, ça bouge pas mal :-D :ok:

Mais j'ai un peu l'impression qu'on empile les situations et les persos sans trop savoir comment on peut finir proprement tout ça. J'ai relu le 5 avant, ce qui me l'a plus fait apprécier, car ce qu'il s'y passe sert directement dans le t6.


...Je veux un pilier pour m'amuser aussi :siffle:
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Nirm » 22/03/2018 09:11

Lu les 2 derniers et ça a bien reboosté mon intérêt pour la série.

Le T.5 ressemble à une péripétie, il est centré sur Pia que son père retrouve et souhaite ramener avec lui.
Catastrophes en série et remise à plat père-fille, le tout fonctionne très bien, surtout que Matteo Scalera est à son top !



Le T.6 est dans la même veine mais totalement barjot.
[Révéler] Spoiler:
Retour dans leur monde où tout a changé, on se croirait dans Retour vers le Futur 2
, la quasi totalité des monstres déjà croisés s'y sont donnés rdv et tout part en vrille !
Même si j'ai pris un peu moins de plaisir qu'avec le T.5, ça reste super efficace et diablement bien mené.
Allez, encore 10 issues pour réussir à conclure et faire de Black Science la première série de Remender, depuis Fear Agent, convaincante sur la longueur, j'y crois ! :D
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede mome » 22/03/2018 22:21

EDIT [:fantaroux:2]
Dernière édition par mome le 09/03/2020 18:57, édité 1 fois.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Buckethead » 23/03/2018 10:08

Perso j'ai trouvé que la qualité baissait tome après tome. J'ai tout revendu et j'attendrai l'intégrale si le final vaut le coup.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Nirm » 23/03/2018 11:17

Tu l'as déjà dit avant la sortie du T4 ou 5 je crois. :)
Franchement j'ai été agréablement surpris avec les 2 derniers.
Certes le 6 est complément barré avec une succession de "catastrophe" mais ça avance bien et je pense comme mome que Remender prépare sa conclusion.
Et puis le taf de Scalera est vraiment chouette.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede mirada2000 » 13/05/2018 19:51

Je vend les 4 premiers tomes 20e, si cela intéresse quelqu'un , j'ai trouvé ça trop confus sur le t4 cela m'a fait abandonné.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede jb18v » 06/08/2018 12:40

Pourtant ça se recadre bien avec les t6 et 7, mais je comprends il y a vraiment beaucoup de choses, et dans le t7 pas mal d'éléments se rejoignent, je me demande comment ça va continuer puis finir :D


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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede jb18v » 01/03/2019 14:15

Tome 8 pris, et au dos on nous indique que le prochain sera le dernier :lire: (j'avais pas spécialement cherché l'info)
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede zyxon » 07/03/2019 16:34

les 4 dernières issues en VO sortent bientot au US
annoncées entre le 27/03 pour la 39 et la 42 le 19/06
et le dernier TPB fin juillet
on peut espérer voir la traduction française avant la fin de l'année
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede zyxon » 16/01/2020 21:52

Dernier tome annoncé le 28 février
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede superboy » 08/03/2020 14:24

Beware of the SPOILER!

Je viens partager mes impressions sur Black Science à l’aune de la fin de la série parue la semaine dernière chez nous. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle éclaire autant qu’elle est informée par tout ce qui l’a précédé. En prouvant définitivement avec ce finale en apothéose une mainmise totale sur son récit, Remender se positionne indubitablement comme un poids lourd de la SF contemporaine, et sa saga interdimensionnelle avec lui.

Pourtant, après un pénultième opus assez faible, la confiance est au plus bas avant d’entamer ce neuvième et dernier volume. En effet, le tome 8 se détachait de l’horizontalité scénaristique et narrative qui avait jusque-là prévalue et apporté sa singularité à la série. En abandonnant sa trame faite de redondance de situations et de permanence de conflits philosophiques constamment réactualisés sans jamais être tranchés pour creuser une mythologie de l’infiniverse à peine ébauchée, et même largement ignorée durant la majorité du run, l’intrigue s’égarait dans une impasse méta complétement déplacée au regard des intentions affichées depuis ses débuts par un scénario dont les enjeux ont toujours reposés sur les épaules de ses personnages, et surtout sur celles de son protagoniste, Grant McKay, dont le moindre choix aura été questionné et remis en perspective par les événements.
Cette décision ne pouvait déboucher que sur des considérations superficielles par trop éloignées du cœur battant de la série. Difficile de revenir de cette impasse sans y laisser des plumes. Encore plus de récupérer le fil de l’histoire, comme le suggérait des retrouvailles malvenues en guise de cliffhanger, qui ne concluaient pas l’arc narratif de manière satisfaisante et n’ouvrait en apparence que sur un long happy end faisandé. Sauf que.

Sauf que cet arc n’est en rien une conclusion avortée, mais plutôt une manière de refermer les portes sur des pans entiers de l’univers sans apporter de solutions aux personnages, de leur dénier toute échappatoire avant de les confronter une dernière fois au thème principal de la série, le choix et le libre-arbitre. Le tome 9 reprend cette entreprise de démolition sans plus en cacher les enjeux réels et pousse la logique à son paroxysme avec
[Révéler] Spoiler:
la mort qui balaie les personnages, d’un revers de main d’une cruelle désinvolture, laissant un Grant exsangue. Un grand bravo à Scalera au passage, qui en une poignée de cases, et notamment une mémorable sur le visage de son anti-héros, parvient à faire passer toute la folie de cet instant diabolique. L’économie de sa narration n’a d’égal que le désespoir qu’elle dépeint.
Avec ce rebondissement définitif, Remender acte le fait que ni la pensée magique, ni le technobabble, ni les lieux communs et techniques scénaristiques du pulp qu’il affectionne tant ne pourront plus dénouer son intrigue. Il se coupe de toutes ses alternatives pour ne plus se laisser qu’une seule option satisfaisante, la plus ambitieuse et casse gueule à la fois, celle d’adresser les thèmes de la série pour les unifier en une fin cohérente. Entre alors en scène Kadir.

La dynamique principale qui fonde l’intérêt de la série oppose l’idéalisme libertaire aux tendances anarchistes de Grant au pragmatisme et au relativisme moral de Kadir, sa némésis de toujours. Le personnage n’apparait au départ que comme le méchant de service, aux motivations au mieux ambigües auxquelles il est impossible d’adhérer. L’auteur crée un jeu de miroir provoquant l’empathie pour son protagoniste sans avoir à transiger sur sa personnalité complexe et les nombreuses failles qui la compose. Le lecteur devine facilement que Grant McKay est un sale con égoïste, mais mis en présence de Kadir, c’est surtout un type bien intentionné qui essaye de faire au mieux.
Kadir n’aurait été que cela, il aurait eu toute sa place dans cette histoire. Mais voilà, Remender va s’extraire de ses habitudes tirées du pulp en doublant sa mécanique narrative d’enjeux thématiques et de mécanismes psychologiques tellement intriqués qu’ils vont s’enrichir mutuellement et lester des péripéties en d’autres circonstances inconséquentes du poids certain de la réalité. On peut s’extasier sur les progrès de l’auteur depuis Fear Agent il y a une décennie. Alors qu’il applique la loi de Murphy aux mésaventures de Heath Houston comme aux tribulations de Grant McKay, ce n’est dans le cas du premier que pour le pur plaisir du rebondissement inattendu et de l’emballement de l’intrigue au service d’un hommage aux histoires qui l’ont inspiré. Black Science, quant à elle, met son développement narratif au service d’un propos abouti et ambitieux, en parfaite adéquation avec les enjeux de son univers de SF, malgré la proéminence de quelques tics d’écriture risquant parfois de verser dans la pompe - ahh… toutes ces voix off qui se mélangent au point d’avoir besoin d’un code couleur pour les différencier – ou une tendance à se disperser - ahh… cette ligue de super héros alternative, hommage superflu à un genre qui n’en a pas besoin. Des défauts bien insignifiants en comparaison de ses accomplissements par ailleurs.
Non des moindres est donc le personnage de Kadir. Le mérite de Remender, et probablement une des plus grandes réussites de sa carrière, aura été de sculpter inlassablement ce cliché unidimensionnel pour en faire "un vrai petit garçon". La structure de l’intrigue, construite délibérément en une répétition des enjeux d’arc en arc, de monde en monde, permet de révéler les personnages. En les confrontant encore et encore aux mêmes choix, la multitude que chacun abrite se dévoile selon qu’ils prennent ou non les mêmes décisions. Si Grant est particulièrement soigné par ce dispositif narratif, c’est bien Kadir qui en profite le plus. Au fur et à mesure de l’intrigue, son discours, qui ne sonnait au début que comme l’autojustification de ses exactions, s’élabore et se mue en une véritable contreproposition philosophique à celle de son antagoniste, toute aussi radicale et intelligible. D’un côté un éternel insatisfait qui cherche à créer un monde meilleur en imposant à tout et tous ses propres règles et dont l’intellect supérieur lui offre les moyens de ses prétentions, de l’autre un monstre d’ambition qui s’est résigné depuis longtemps à accepter l’idée qu’on ne peut ignorer ni les règles qui régissent le monde ni les volontés d’autrui, et qu’il est nécessaire de s’y plier pour atteindre ses objectifs, trouver sa place et peut-être un peu de compassion et de compréhension auprès des autres, quitte à accepter les compromis les plus douteux. Cette opposition met en tension tout le récit, lui apportant sa richesse et sa complexité, et Remender l’a bien compris. C’est pourquoi il ne se trompe pas en recentrant la conclusion de son intrigue sur cette dualité.

Si l’on n’en comprend pas les intentions, les trois derniers numéros de la série peuvent donner l’impression d’être catastrophiques. Le principe est le même que la fin d’Evangelion. Le scénario débranche brutalement l’action pour suivre le cheminement psychologique de son protagoniste vers le choix le plus important de sa vie. Là où l’élève dépasse le maître, c’est dans la forme que prend cet ultime choix, qui résonne avec des éléments fondamentaux de la série pour révéler une vérité fort bien cachée sur la nature humaine.
[Révéler] Spoiler:
Kadir, la compromission incarnée, a donc vaincu la toute puissante sorcière dimensionnelle Doxta de la seule façon qu’il était possible de le faire, en lui proposant un marché qu’elle ne pouvait pas refuser. Le fait qu’on ne découvre jamais la teneur du pacte scellé est savoureux car la méthode suffit à identifier exactement le parcours du personnage et ce qu’on a appris à attendre de lui. Cela compte au final moins que de valider sa vision du monde.
Plus que le pouvoir, Kadir obtient la permission de refonder l’infinivers à son image, la différence tenant à ce que le scénario ne tranche pas définitivement l’antagonisme primordial sur lequel il repose, ni ne le fera jamais. Et le multivers qu’il édifie n’est pas aussi terrible que le laissait supposer la vindicte qu’il a subi une grande partie de l’histoire. Il s'appuie même sur un système ressemblant étrangement au crédit social chinois, un bien petit prix à payer pour rester équilibré et en bonne santé, presque sécurisant. Sauf évidemment pour Grant McKay, qui préfère être libre qu’heureux.
Le choix est simple, continuer à se battre pour son idéal ou enfin accepter son sort.

Remender utilise brillamment le principe d’univers quantique à la base de tout son scénario pour établir un dispositif qui lui permet de suivre les conséquences du choix de son personnage principal dans les deux mondes qu'il a créé. Ce qui signifie implicitement qu’il portait en lui ces deux choix diamétralement opposés aux répercussions dramatiquement symétriques. Ces Grant que les agissements éloignent l’un de l’autre à mesure que les événements divergent sont malgré tout parfaitement reconnaissables. Aussi contradictoires que soient désormais leurs comportements, ils ont toujours été capables des deux, parfois dans un même élan. Ce que raconte cette narration schizophrénique, c’est l’intériorité des individus, aussi vaste que paradoxale. Tellement qu’elle ne peut être traduite toute entière par leurs actes. Les décisions que l’on prend ne peuvent en aucun cas suffire à définir tout un chacun. Bien souvent, les choix que l’on fait relèvent de l’arbitraire plus que du libre arbitre. Tiraillés par ses contradictions, c’est dans la confusion et presque par défaut que l’on agit, une fois confronté au mur du réel.
Dans un élégant mouvement de boucle scénaristique, cette émouvante réflexion en forme de point final des aventures de la famille McKay renvoie immanquablement au funeste augure qu’avait prophétisé il y a longtemps un Grant alternatif au héros malheureux de cette histoire, laissant deviner le caractère le plus tragique cette prédiction: il n'aurait tenu qu’à lui de la défaire.

En mijotant cette fin grandiose à une série qui jusqu’alors était de très haute tenue, Remender l’élève ostensiblement au-dessus de sa condition supposée de divertissement pour en faire un monument de SF moderne et innovante, dont le seul tort est d’être un comic un peu trop mainstream au dessin un trop pop produit par une industrie un peu trop standardisée pour être pris au sérieux. Mais surtout, elle aura à mon avis souffert du manque d’exigence d’une presse culturelle dont la qualité de l’appareil critique est pour le moins fluctuante et qui de toute façon réserve le plus souvent les quelques signes qu’elle alloue à la BD au sacrosaint roman graphique, quand on la trouve à foison pour le cinéma, la musique ou même maintenant les séries TV. Cette BD peut trop facilement être ignoré pour ce qu’elle représente alors qu’elle mériterait d’être reconnue pour ce qu’elle raconte. Il ne sera heureusement jamais trop tard pour la redécouvrir.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede driepick » 08/03/2020 22:37

superbe analyse !

en effet, ce tome conclusif termine haut la main cette serie et meme si les precedents tomes nous perdaient, ici on referme l'album en se disant qu'on a vecu une sacrée aventure. un futur classique sf !
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Bolt » 09/03/2020 13:20

@superboy: tu m'as convaincu d'y rejeter un coup d’œil. Je n'avais pas apprécié plus que ça les premiers numéros et par conséquent pas persévéré.

Pour ce que j'en connais, je n'ai pas un bon rapport à l'oeuvre de Remender (Fear Agent compris), en gardant toutefois une possibilité de réviser mon avis. Parmi les tics que je lui reconnais, sa façon d'opposer ses principaux personnages à des choix crèves-cœurs et/ou répréhensibles me plait bien dans un premier abord, me me donne la sensation de rentrer dans une mécanique trop évidente même si pas désagréable.

Sinon, par rapport à ton allusion à Evangelion, tu t'appuies sur quelle fin ?
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede BWayne » 09/03/2020 14:34

Je suis en train de relire l'entièreté (j'avais lu les premiers mais m'étais arrêté). Je suis donc au dernier tome. Graphiquement, c'est souvent magnifique. Je trouve qu'on sent tout de suite quand le dessinateur n'accroche pas plus que cela à l'histoire, son trait faiblit mais reste honnête. Le scénario est en général très bon sauf quand il se perd dans des histoires de super-héros qui, je trouve, n'ont rien à voir avec son récit premier. Là ça devient confus et parfois difficile à appréhender (pour moi en tous cas). Mais dans l'ensemble, j'aime beaucoup.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede superboy » 09/03/2020 15:16

Bolt a écrit:Sinon, par rapport à ton allusion à Evangelion, tu t'appuies sur quelle fin ?
Ha ! Très bonne question. Je parle de la fin originale de la série, où l'on suit l'accomplissement du plan de complémentarité de Shinji, au mépris de l'action avec l'assaut sur le QG de la NERV. Les films produits après n'ont eu pour but que de "réparer" cette "erreur" en terminant le récit de manière plus conventionnelle. Ils sont d'ailleurs encore au boulot chez Gainax, et ils n'arrivent toujours pas à s'en dépatouiller de cette fin, avec le quatrième et dernier opus du Rebuild dont on n'a plus aucune nouvelle depuis la sortie du précédent en... 2012 !

Merci Bolt, ça faisait des années que je ne m'étais plus senti aussi geek. En me relisant, tout me revient d'un coup. Je n'ai pas pu m'empêcher de sourire en repensant à cette époque bénie.

Bolt a écrit:@superboy: tu m'as convaincu d'y rejeter un coup d’œil. Je n'avais pas apprécié plus que ça les premiers numéros et par conséquent pas persévéré.

Pour ce que j'en connais, je n'ai pas un bon rapport à l'oeuvre de Remender (Fear Agent compris)
Si tu n'as jamais accroché au style du scénariste, ne t'attends pas à ce que Black Science te retourne le cerveau. C'est du Remender pur jus, avec tous ses tics d'écriture parfois poussés au-delà du raisonnable, comme je le précisais rapidement précédemment. Pour ma part, je suis très client de sa caractérisation des personnages au moyen d'une voix off subjective omniprésente. Une technique pas forcément à mon goût à priori, mais qu'il porte à un niveau de maîtrise époustouflant avec Grant McKay, un personnage avec lequel il m'aura fait rentrer en profonde empathie. C'est d'ailleurs une des principales raisons expliquant mon très fort ressenti au sujet de la fin de la série, avec évidement le génie de son postulat et la qualité de son exécution.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede superboy » 09/03/2020 16:17

Hé ouais, double post !
Bolt a écrit:Parmi les tics que je lui reconnais, sa façon d'opposer ses principaux personnages à des choix crèves-cœurs et/ou répréhensibles me plait bien dans un premier abord, me me donne la sensation de rentrer dans une mécanique trop évidente même si pas désagréable.

Je comprends bien ce que tu veux dire, et le côté doloriste trop répétitif de Fear Agent n'est à mon avis pleinement rattrapé que par son dernier acte consacré aux regrets de Heath Huston et au regard distant, nostalgique et plus désespéré que désabusé qu'il porte sur tout ce qu'il a perdu. La fin presque poétique de la série apporte un contrepoint salvateur à l'enchaînement assez mécanique de crève-cœurs dont tu parles.

Dans Black Science, on retrouve cette dynamique, avec tout de même une maîtrise accrue qui se traduit par une meilleure gestion du rythme qui estompe l'impression de prévisibilité des péripéties, mais surtout une meilleure caractérisation des personnages qui renforce énormément l'empathie et rend leurs dilemmes intimes et moraux beaucoup plus personnels et subtils, moins génériques en tout cas que ceux développés dans Fear Agent.
La relation au père de Grant et comment elle a influencé ses choix, les sentiments de rejet de Kadir, d'aliénation de Sara, même celui de révolte adolescente de Pia, sujet pourtant largement maltraité dans la culture occidentale contemporaine; j'ai eu une réponse émotionnelle très forte à tous ces éléments et bien d'autres encore tant Remender trouve systématiquement le ton juste et la bonne distance pour les ausculter. Je n'ai pas abordé tout ce qui aurait mérité de l'être dans ma critique car pour cela il aurait fallu que je relise la série et que j'écrive un texte trois fois plus long, mais Black Science est une œuvre vraiment riche dans laquelle je me replongerai avec plaisir.
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede fanche » 09/03/2020 18:09

J'ai gagné le droit de tout reprendre :bravo:
ça va êtrte un gros kiff je le sent. :love:
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Re: Black Science (Remender/Scalera)

Messagede Donut78 » 10/03/2020 11:19

superboy a écrit:Ha ! Très bonne question. Je parle de la fin originale de la série, où l'on suit l'accomplissement du plan de complémentarité de Shinji, au mépris de l'action avec l'assaut sur le QG de la NERV. Les films produits après n'ont eu pour but que de "réparer" cette "erreur" en terminant le récit de manière plus conventionnelle. Ils sont d'ailleurs encore au boulot chez Gainax, et ils n'arrivent toujours pas à s'en dépatouiller de cette fin, avec le quatrième et dernier opus du Rebuild dont on n'a plus aucune nouvelle depuis la sortie du précédent en... 2012 !

Si si on a des nouvelles, le quatrième et dernier film sort le 27 juin 2020 :D

Sinon j'ai ré-attaqué la lecture du premier black science hier soir, c'est parti !
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