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aris, 1955. Juliette de Saint-Éloi apprend que sa mère, censée être décédée quelques mois après sa naissance, pourrait se trouver au Vietnam. Souhaitant tirer les choses au clair, la journaliste se rend en Asie pour la retrouver. Elle doit toutefois faire vite, car le pays se fracture et la confusion règne. Sa quête personnelle se déroule avec en toile de fond le rapatriement d'enfants métis, nés de l'union de soldats français avec des Vietnamiennes.
Yves Sente signe un scénario où la petite histoire s'inscrit habilement dans la grande. Les temps sont durs et il faut de la chance pour s'extirper du bourbier géopolitique. La belle aventurière est bénie des dieux quand d’anciennes connaissances, Fraiser, Surich et Werner, viennent tour à tour lui porter secours. Trois sauvetages inopinés dans un même récit, c’est beaucoup ; le procédé entache d’ailleurs le réalisme de l'entreprise.
Personnage un peu froid, Mademoiselle J semble à peine affectée par les événements, même s’ils la touchent de très près. Sans verser dans la caricature, il aurait été intéressant de ressentir davantage de joie ou de colère. Alors qu'elle devrait vivre de fortes émotions, la demoiselle demeure étrangement stoïque ; l’album a pourtant pour titre Le bonheur de dire maman.
Le trait charbonneux et les généreux décors de Laurent Verron séduisent. L'artiste peine cependant à diriger le jeu de la protagoniste. Certes, elle est mignonne comme tout et elle adopte toujours la bonne posture pour mettre en valeur ses formes longilignes, mais il s’en dégage un petit quelque chose d’artificiel. Le lecteur a également du mal à la croire quand elle est sujette à l'étonnement ou à la peur. Cela dit, une femme de quarante ans, qui paraît en avoir dix-neuf, manque forcément de naturel.
Un sympathique récit d'aventures ; peut-être les auteurs gagneraient-ils à humaniser l’héroïne pour lui donner plus de densité… et à se garder de faire un usage abusif des ressorts narratifs trop faciles.

















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