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acques Brel les avait décrits avec respect et un soupçon d’effroi dans sa célèbre chanson datée de 1963. Cinquante plus tard, Delphine Panique prend moins de pincettes avec sa Vieille à elle. Par contre, progrès de la médecine ou pas, la conclusion des deux œuvres n’a pas changé : "La pendule d’argent ronronne au salon, elle dit oui, elle dit non et puis les attend», imperturbablement."
Les vieux fourneaux, #Lesmémés, sans oublier les multiples reboots «classic» d’anciens héros du patrimoine, pas de doute, les éditeurs grands publics ont compris que la démographie a bougé. Résultat, ils adaptent leurs catalogues à l’évolution du marché. Il n’y a pas de raison que la BD indépendante ne suive par le même chemin.
Recueil d’histoires courtes et de strips, Vieille raconte le quotidien d’une mémère au caractère bien trempé (coucou Carmen Cru) et à la solitude douloureuse. Plus exaspérée que véritablement méchante, elle est devenue une scorie dans un monde fluide qui n’aime pas les rappels au passé. Le bon côté des choses, c’est que personne ne fait vraiment attention à elle. Cette dernière en profite pour se lâcher et partager à la volée ses observations et son désespoir. Ça ne changera pas la donne, mais ça soulage. Et puis, elle sait parfaitement que le tour viendra aussi pour ces blancs-becs aux morphologies appétissantes (âgée, mais pas de bois !) et ces pimbêches gloussantes : rides, douleurs et le grand vide, tic-toc, tic-toc.
Toujours sur le fil, entre humour grinçant et douceur infinie, Delphine Panique dresse un portrait tour-à-tour touchant et hilarant. De plus, comme l’autrice a réussi à élargir et dépasser sa thématique de départ, elle offre finalement une peinture sociale globale des plus pertinentes. De toute façon, la fin est connue, alors autant rire pendant qu’il est encore temps.








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