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Inca ou la rencontre avec un peuple du soleil

Entretien avec Laurent Granier

Propos recueillis par L. Gianati Interview 02/07/2013 à 15:59 10017 visiteurs

Le Temple du Soleil continue de faire rêver des générations de lecteurs. Du sacrilège du professeur Tournesol, au voyage extraordinaire dans les Andes et en forêt amazonienne jusqu'à l'épisode incroyable de l'éclipse solaire, ces aventures de Tintin ont certainement dû susciter des envies de voyages chez les jeunes bédéphiles. L'expédition entreprise par Laurent Granier en 2005 pendant dix-huit mois, le long du Qhapaq Ñan (le chemin de l'Inca), l'a mené du Sud de la Colombie à Santiago du Chili sur plus de six milles kilomètres. À son retour, les sacs remplis de documents et de photos, et des souvenirs plein la tête, il a réalisé deux films et écrit un livre mais aussi imaginé son premier scénario de bande dessinée. Avec l'aide précieuse de Laurent-Frédéric Bollée et après avoir choisi le trait réaliste de Lionel Marty, il signe avec Inca, "la première saga réaliste autour de la civilisation Inca".


Pourquoi avoir choisi la bande dessinée pour Inca ? Que vous apporte ce medium par rapport aux autres que vous avez l’habitude d’utiliser (documentaires, livres…) ?

Laurent Granier : Je suis un grand lecteur et amateur de bandes dessinées. À part les récits de voyage, je ne lis quasiment que ça. C’était vraiment un rêve de môme de réaliser un jour une BD. Quand j’ai parcouru la route du Qhapaq Ñan (Grande Route inca, NDLR) pendant dix-huit mois, en 2005, et à force de voir au fil des kilomètres des sites archéologiques parsemés d'histoires et de légendes, je me suis dit qu’il fallait que j’en fasse un scénario. J’ai d’abord sorti un livre chez GEO ainsi que deux films de cinquante-deux minutes pour France 5 qui ont donné lieu à un gros article de dix-huit pages également dans GEO. Puis, j’ai trouvé que le moment était le bon pour m’attaquer à un projet de bande dessinée. Je suis copain avec Alex Alice avec qui on a fait les mêmes études. C’était mon voisin de dortoir à l’internat ! Il passait d’ailleurs ses nuits à dessiner des personnages fantastiques. C’est donc lui qui m’a fait rencontrer les éditions Glénat. Je m’éclate vraiment dans ce domaine. J’ai souvent l’habitude de raconter vraiment ce qui se passe avec des documents, des photographies… Dans la BD, c’est de la fiction et le champ des possibilités est immense. C’est finalement très complémentaire en termes de travail : je suis parti de mes expériences de voyages pour en faire une fiction.


Inca est donc votre première bande dessinée ?

L.G. : Tout à fait.

Ceci explique donc votre association avec un scénariste de métier comme l’est Laurent-Frédéric Bollée ?


L.G. : Exactement. On travaille vraiment à quatre mains. J’écris l’histoire, la trame générale. Ensuite, Laurent-Frédéric passe derrière et apporte toute son expérience en termes de dialogues, de narration. Il m’a aussi permis de clarifier un peu l’histoire qui, au départ, était très dense. Il y a les Incas d’un côté, les Espagnols de l’autre, des destins qui se croisent et s’entrechoquent… Il peaufine, propose des choses… On avance comme ça.

Vous êtes désormais prêt à vous lancer seul dans l’écriture d’un scénario ?

L.G. : Pour le tome deux d’Inca, je continue avec Laurent-Frédéric. Après, je ne sais pas… Mais je trouve ça sympa de travailler en couple, d’avoir un regard extérieur quand j’ai la tête dans le guidon sur un scénario sur lequel je travaille depuis longtemps. Et puis Laurent-Frédéric est un gars super sympa avec qui je prends beaucoup de plaisir à travailler et à imaginer de nouvelles histoires.

L’histoire démarre au tout début du 16e siècle. L’empire Inca atteint son apogée alors que les espagnols découvrent la mer du Sud. Pourquoi avoir choisi précisément cette période ?

L.G. : Il y avait une correspondance en termes de dates, celle de l’arrivée de mon personnage principal et celle des grands faits historiques qui se sont déroulés pendant cette période. Et puis, je trouvais très intéressant de commencer le récit avec Balboa, un homme fascinant et pourtant inconnu du grand public. C’est un découvreur du Pacifique et c’est véritablement lui qui a ouvert une voie navigable possible vers la Cordillère des Andes.

Il existe aussi une autre correspondance de dates : celle de la mort d’Huayna Capac et de la deuxième venue de Pizzaro sur les terres Incas…

L.G. : Oui. La question relative à l’incroyable rapidité avec laquelle Pizarro est venu à bout des Incas demeure. Dès le premier contact entre les Espagnols et les Incas, la variole s’est disséminée à une vitesse fulgurante dans la Cordillère des Andes. Au milieu de ça s’est glissée également une guerre civile liée à la succession de l’Empire entre Huascar et Atahualpa. Au final, les Espagnols sont arrivés sur les ruines de la splendeur de l’Empire Inca. Ils n’ont donc eu aucune difficulté à dominer cette population.

La première case de l’album prend le lecteur à contre-pied. Le charnier n’est pas l’œuvre de conquistadors mais bel et bien de l’Empereur Inca…


L.G. : Tout à fait. On a d’ailleurs souvent appelé à tort la « civilisation » Inca alors qu’il s’agit avant tout d’Empereurs Incas. Ces derniers ont, sur une période très courte, soit une centaine d’années, dominé un territoire immense en partant de Cuzco, du Sud de la Colombie à Santiago du Chili. Ils ont donc été obligés de partir en guerre contre d’autres tribus qu’ils ont soumises. Cette première scène montre justement l’une des multiples guerres menées par Huayna Capac pour agrandir son territoire.

La manière très précise dont vous décrivez le mode de vie des Incas permet-elle de battre en brèche les idées reçues ou autres fantasmes liés à ce peuple ?


L.G. : La grande majorité des gens font l’amalgame entre les Mayas et les Incas. Les Mayas et les Aztèques concernent l’Amérique Centrale. Alors que les Incas, c’est vraiment la Cordillère des Andes. J’ai fourni énormément de documentation à Lionel Marty : des photos, des descriptions sur la manière de se vêtir, des plans de sites archéologiques... On s’est servi de ça pour essayer de raconter en détail ce système Inca, qui est très riche. C’est un peu un système soviétique avant l’heure puisque la propriété individuelle n’existait pas, tout était collectif. C’est aussi pour ça que l’on peut expliquer comment la ville de Cuzco et les routes ont pu être construites à une telle vitesse. Tout le peuple était au service de l’Empereur. On envoyait également des spécialistes d’une ville à l’autre avec toute leur famille pour transmettre un savoir, pour assurer l’hégémonie Inca mais aussi pour développer des techniques artistiques.

Le récit d’Inca est-il romancé ou respecte-t-il scrupuleusement la réalité historique ? Par exemple, Nuna, la compagne d’Amaru, a-t-elle vraiment existé ?

L.G. : On est complètement dans la réalité historique à la fois du monde Inca et de la conquête espagnole. Ensuite, il y a des personnages, comme Nuna et Amaru, qui eux sont fictifs. Ils sont néanmoins issus des histoires de certains peplums, un peu comme Moïse sur le lac Titicaca. Bien sûr, ces deux enfants vont avoir un destin extraordinaire, c’est ce que l’on va découvrir au fil des cinq tomes de la série.

Il n’y a donc aucun lien entre Amaru et Tùpac Amaru, le dernier des Incas ?

L.G. : En fait, je ne sais pas bien encore. (sourire) L’histoire est déjà écrite jusqu’à la fin mais elle risque d’être un peu modifiée au gré de mes idées et du retour des lecteurs. Je ne sais pas encore si cette bande dessinée va se terminer sur des faits historiques réels ou si je ne vais pas revisiter l’Histoire. Par exemple, imaginer que les Incas aient eu un véritable leader lors de l’invasion espagnole… L’Histoire aurait-elle pu être écrite différemment ? Que serait l’Amérique Latine aujourd’hui si les Incas avaient gagné ?

Inca peut donc se transformer en uchronie d’un moment à l’autre…(sourire)

L.G. : Peut-être ! Au niveau du scénario, on est encore loin de la rébellion Inca. On a encore du temps avant qu’Amaru puisse récupérer les trois autres statuettes. Ce dernier va vivre des aventures assez folles, il va partir dans tous les coins de l’Amérique Latine, des volcans de l’Équateur aux montagnes perpendiculaires du Pérou, en passant par le lac Titicaca et la jungle amazonienne… Les univers sont très différents. Peut-être qu’alors la vraie Histoire et celle d’Amaru vont finir par se rejoindre…

Vous avez passé dix-huit mois en Amérique Latine en parcourant notamment le Qhapaq Ñan. Quelle expérience avez-vous tirée de cette aventure ?

L.G. : La route des Incas est candidate au patrimoine de l’UNESCO, et il est fort probable qu’elle y soit inscrite à la fin de cette année ou en début d’année prochaine. J’ai marché pendant un an et demi dans les Andes et l’histoire d’Inca est venue petit à petit au fil des kilomètres. J’ai commencé à inventer cette histoire dans mon esprit. Ce que je trouve assez fascinant, c’est le mythe de l’Eldorado, cette idée qu’une fois les Espagnols installés, les Incas mais aussi toutes les peuplades autour auraient caché leurs trésors à différents endroits. En Colombie, on dit que les indiens ont caché leurs trésors au fond des lacs, au sommet des volcans. Au Pérou, on dit que cet Eldorado se trouverait dans la jungle amazonienne, la fameuse grotte au disque d’or qu’on commencera à découvrir dans le tome deux. Il y a plein d’endroits au cours des voyages où l’on rêve de devenir un Indiana Jones, de déclencher un mécanisme quand on pose ses doigts sur une aspérité rocheuse qui cache une grotte incroyable… En particulier, dans les canaux sacrés de Cajamarca, des nautiles ont été dessinés. On a vraiment envie d’appuyer au milieu en se disant qu’il va forcément se passer quelque chose. (sourire)

Et la bande dessinée vous a semblé d’emblée le medium le plus approprié pour raconter cette histoire…

L.G. : Oui. Même si on aurait pu la raconter dans un dessin animé ou dans un film. Mais la bande dessinée reste mon medium préféré.

Comment avez-vous choisi Lionel Marty ? Recherchiez-vous un style graphique particulier ?


L.G. : En fait, je suis allé à la librairie Bulle au Mans pour chercher un dessinateur. J’y ai rencontré Lionel Marty et j’ai trouvé que son dessin était très puissant. Il avait aussi l’habitude de récits historiques. J’adore le style du Troisième Testament, de Long John Silver, ce genre de saga historique incroyablement bien dessinée. J’ai pensé que le trait de Lionel pouvait s’en rapprocher.

Comment avez-vous collaboré avec Lionel Marty ? Avez-vous laissé le soin à Laurent-Frédéric Bollée de gérer cette relation ?

L.G. : Non, c’est plutôt moi qui suis en rapport avec Lionel. J’ai écrit la trame générale de l’ensemble de l’histoire en cinq tomes, peut-être plus, peut-être moins. J’ai ensuite fait un découpage du tome un page par page, planche par planche et case par case. Ce n’est qu’ensuite que Laurent-Frédéric est venu changer ou modifier quelques petites choses. Avec Lionel, on s’est beaucoup vu au début, en particulier sur la mise en page. Ensuite, je lui fournis planche par planche toute la documentation nécessaire. J’ai beaucoup travaillé avec Carmen Bernand, spécialiste des civilisations latino-américaines. Ce que Lionel a dessiné est, je pense, très proche de la réalité de l’époque.

Patrick Poivre d’Arvor avait déjà préfacé Bienvenue chez vous! Le Tour de France à pied - 6000 km le long des frontières. Il est encore présent sur Inca. Vous avez un véritable fan ! (sourire)

L.G. : Oui, j’ai un fan ! (sourire) On s’est en fait rencontrés lors d’une émission de RTL qui concernait une expédition que j’avais menée en Alaska. Depuis, il a préfacé un certain nombre de mes bouquins. C’est quelqu’un qui adore voyager et qui est fasciné par les grands explorateurs. Il a d’ailleurs écrit plein de livres avec son frère à ce sujet. Il y a donc le PPDA très people qui raconte des choses très personnelles ou plus en relation avec son métier de journaliste, et celui qui est passionné par les grands navigateurs et le voyage en général. Il vit un peu par procuration des choses qu’il aurait adorées faire. Et puis, nous habitons tous les deux à Trégastel.

Vous avez dit que la série Inca est prévue en cinq tomes. Connaissez-vous son rythme de parution ?


L.G. : On va essayer de sortir le tome deux le plus rapidement possible, fin de cette année ou début d’année prochaine. Il est en tout cas intégralement écrit et les premières planches ont été dessinées.

Trois épisodes de Just Married sont actuellement diffusés sur France Ô dont le premier, justement,
se déroule au Pérou. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur ce documentaire ?

L.G. : En fait, nous avons parcouru, avec ma compagne, la France à pieds l’année dernière et je lui ai demandé sa main le jour du départ. À la fin de ce voyage, nous avons décidé d’aller découvrir à travers le monde comment les gens se disent « oui » pour choisir notre manière de nous marier. On vient de faire le Pérou, le Maroc et l'Inde. On part ensuite sur Venise, la Crète et le Cap Vert. L’objectif est d’avoir une grande variété de mariages en termes de religion, de continent, d’univers, comment on se marie dans le désert, sur une île, dans la montagne… Ce sont des films incarnés, dans le sens où l’on se filme nous-mêmes et on suit ce mariage tout en tissant une relation d’amitié avec le couple qui va se marier. Cela donne des films très spontanés, intéressants aussi car on voit de plus en plus des gens de notre âge habillés avec les mêmes jeans, utilisant les mêmes téléphones portables, écoutant la même musique ou mangeant les mêmes hamburgers. Dans les mariages, on a un vrai concentré de rites et de traditions et ça, ça ne change pas. Ce projet s’inscrit dans un projet plus vaste qui est de suivre les grandes étapes de la vie : Just Born pour les bébés, le passage à l’âge adulte, les mariages donc, puis enfin à la vénération des ancêtres.

Avez-vous d’autres projets de bandes dessinées ?

L.G. : Plein. L’idée est d’utiliser nos voyages pour raconter plein d’histoires différentes de plein de manières différentes. Ma future femme, Aurélie, écrit des romans de voyage pour enfants (Lya au pays des Incas), pour adolescents (Saya)… On est tous les deux des grands fans de l’Amérique Latine. De ces voyages, on fait des livres de photos, des films pour la télévision, de la bande dessinée, des livres pour enfants. Mon rêve absolu serait de faire du doc réel, un peu comme ce qu’a fait Nicolas Vanier avec Loup ou Le Dernier Trappeur. C’est cette variété que je trouve très intéressante, celle de passer du doc à la fiction et inversement. Pour l’instant, je me concentre sur Inca et sur Les Mariages du Monde.


Propos recueillis par L. Gianati

Information sur l'album

Inca
1. L'empire des quatre quartiers

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