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Aveline Stokart : « La BD est peut-être là où je vais me sentir bien »

Entretien avec Aveline Stokart et Kid Toussaint

Propos recueillis par L. Gianati et C. Gayout Interview 13/04/2021 à 16:18 5570 visiteurs

Difficile d'imaginer que Elles est le premier album de BD dessiné par Aveline Stokart. Jeux de perspectives, utilisation de la lumière, expressivité des personnages, la jeune femme qui vient du monde de l'animation 3D a déjà tout d'une talentueuse autrice. Sur un scénario de l'inénarrable Kid Toussaint, elle livre un travail remarquable qui ne devrait laisser personne indifférent.

Kid, d’où vous est venu l’idée de Elles ?

Kid Toussaint : Je me suis grimé pour intégrer un lycée en tant qu’adolescent, on me donnait à peu près treize ans et j’ai pu mener des études… Mais non ! Pas du tout… Ça ne s’est pas déroulé comme ça, ce serait bien mais ce n’est pas le cas. En fait, j’ai un personnage dans Magic 7 qui s’appelle Farah et qui a deux personnalités. Je n’ai pas pu développer cet aspect autant que je le voulais parce que dans cette BD il y avait 42 personnages et de l’action dans toutes les pages. J’avais aussi en tête la chanson Léa de Louise Attack et She’s a Rainbow des Rolling Stones. J’ai continué a développer un personnage qui a plusieurs personnalités, qui change d’avis à tous moments et de couleur de cheveux en mettant tout le monde dans l’embarras, elle en premier. Au départ, ce personnage n’avait pas vraiment d’âge mais le lier à l’adolescence, ça avait du sens.

Avec "Rainbow", vous aviez déjà les couleurs !

K.T. : Je suis même allé plus loin que les paroles car, dans celles des Rolling Stones, ils ne parlent que de deux couleurs. Je me suis dit qu’ils racontaient des choses intéressantes, c’est juste que je parle mal anglais (sourire)…



Difficile de ne pas penser au film d'animation Vice-Versa quand on découvre Elles pour la première fois...

K.T. : Je n’y avais pas pensé au départ. Aveline à dû me le dire en premier je pense. Quand elle a lu le synopsis c’est la première qui m’a dit que ça lui faisait penser à Vice-Versa et que ça touchait son univers. Du coup, ça tombait bien. De toutes façons, en règle générale, si on pense à un autre scénario que le sien, on ne le fait pas, on arrête de suite. On se dit qu’on va répéter des choses et qu’il ne faut pas le faire. Je ne l’avais pas en tête et heureusement.

Aveline Stokart : Je pense que la similitude s’arrête vraiment à l’utilisation des couleurs qui transmettent une signification.

K.T. : Oui, mais il n’empêche que si tu me l’avais dit au moment où j’écrivais le début du synopsis, je me serais interrompu et je n’aurais pas continué.

A.S. : Ça t’aurait coupé ! Heureusement que je ne lis qu’après !!! (Rires)

K.T. : Oui heureusement mais je stressais quand on en a parlé.

A.S. : C’est quand même très différent.

K.T. : C’est un parallèle normal et je pense que les libraires aiment bien les formules comme ça. De dire « si vous avez aimé Vice-Versa, vous allez aimer Elles ».

A.S. : Ça aide peut-être des gens à se raccrocher à quelque chose et à avoir plus de facilité à se projeter dans l’histoire en se disant « ah oui c’est vrai, ça me fait penser à… ».

Avez-vous des adolescents dans votre entourage ?

K.T. : Je suis un adolescent dites-moi ! Si je m’appelle Kid ce n’est pas pour rien (rires). J’ai une bonne mémoire et comme je dis toujours, si on veut toucher quelqu'un aujourd'hui il faut parler d’universalité et d’intemporalité et il y a vraiment des choses qui sont communes à toutes les jeunesses et à tous les lieux. Après, il faut ajouter les accessoires et ce n’est pas grand chose. Aveline a vachement travaillé sur la mode actuelle, sur les fringues, sur la façon de se coiffer, etc, parce qu’elle est très professionnelle, ce qui n’est pas mon cas (rires). Perso, j’aurais juste ajouté un téléphone portable et ça faisait 2020 (rires)…

A.S. : Je suis juste une vieille mégère qui peut regarder par la fenêtre parce qu’il y a des écoles secondaires autour de chez moi. Des jeunes, j’en vois passer tous les jours dehors et je m’amuse souvent à les observer : comment ils sont habillés, comment ils sont en train de se mouvoir, comment ils parlent. Je ne suis pas au sein de leur conversation évidemment mais parfois, quand ils sont en train de trainer, j’entends la manière qu’ils ont de s’exprimer. Quelque part je garde un œil sur eux…

K.T. : Tu les suis dans la rue !

A.S. : Je les suis, je les filme, je fais des photos, j’ai tout un cahier sur eux (rires)… Non… Kid n’a pas tort quand il dit qu’on est soi-même adolescent. C'est comme s’il y avait un moment où on s’arrête de grandir. L’enveloppe continue de vieillir mais il y a des questionnements qui perdurent, qu’on retrouve dans l’adolescence, qui peut-être naissent à l’adolescence, mais qui restent après, au fur et à mesure. Ce sont des questionnements qui évoluent, se développent différemment quand on prend de l’âge. Mais je trouve qu’il y a des questionnements qui peuvent autant raisonner chez un adulte que chez un ado. Je trouve qu’on a tous une part d’ado en soi qui reste de toute façon (rires).

K.T. : Grandir finalement c’est oublier les questions qu’on se posait et ne pas y répondre. Les questions sont toujours les mêmes.

Aveline, vous venez du monde de l’animation. Faire une BD c'était quelque chose qui vous trottait dans la tête depuis longtemps ou cela a-t-il été un concours de circonstances ?

A.S. : C’est plutôt un concours de circonstances. Je ne pensais pas faire de la BD, vraiment pas. J'étais dans mon délire d’aller faire du character design, développer des univers, des personnages pour le film d’animation parce que c’est surtout avec ça que j’ai grandi. En regardant les films d’animation, j’adorais que l’univers et les personnages puissent bouger et je ne m’étais jamais trop posé de questions par rapport à la BD. Les grands classiques que l’on connaît et que l’on met souvent en avant, ce n’est pas un style graphique qui me parlait. Le traditionnel Franco-Belge ne m’a jamais attiré visuellement en fait. Jusqu’au jour où, un peu simultanément, presque en même temps, Kid et Mathias (Vincent, éditeur au Lombard, NDLR) m’ont contactée en me demandant si ça m’intéresserait de faire de la BD. Mathias m’a demandé ce que je connaissais en BD, si j’en lisais beaucoup, et je lui ai répondu que j’étais complètement novice. Je n’y avais jamais songé mais maintenant qu’il me l’avait exposé de cette façon, qu’il m’avait rassurée sur le fait que mon style peut totalement se prêter à l’exercice, j’ai commencé à voir les choses différemment en me disant que c'était idiot de se mettre des limites. Pourquoi est-ce qu’il y aurait certains codes qui seraient spécifiques à un médium plutôt qu’à un autre ? L’important c’est que l’on comprenne, qu’on se fasse plaisir visuellement, qu’on plaise à un lectorat et si ça marche, tant mieux. En même temps, Kid m’avait contactée pour me proposer de faire de la BD avec notamment ce scénario-là qui est tombé à pic. Pouvoir jouer avec toutes les émotions c'était quelque chose qui me tenait vraiment à cœur. Les planètes se sont alignées.

Kid, comment avez-vous eu connaissance du travail d'Aveline ? Recherchiez vous un style graphique particulier pour Elles ?

K.T. : C’est compliqué, je n’ai jamais vraiment un style de dessin particulier en tête. A postériori, je peux vous dire qu’Aveline était vraiment la dessinatrice qu’il fallait pour ce projet-là, mais sur le moment je n’y pensais pas. Rencontrer quelqu'un comme Aveline, c’est un peu exceptionnel dans le monde de la BD. En réalité, c’est juste une copine qui m’a montré le compte Instagram d’Aveline. Il y a des tas de bons illustrateurs sur Insta mais ils font toujours ce qu’ils savent faire et c’est toujours plus ou moins les mêmes genres de poses, de personnages, que l’on retrouve. Avec Aveline, ça changeait à chaque post, elle se mettait en danger tout le temps, elle créait un nouvel univers à chaque fois : un nouveau type de personnage, un nouveau cadrage, un nouvel angle... elle variait vachement ce qu’elle savait faire. Il y avait une telle palette qui s’offrait que je me suis dit qu’il fallait vraiment que je la contacte de suite parce qu’elle était capable de faire quelque chose de génial. Je lui ai alors écrit et coup de bol elle n’habitait pas loin (rires) donc on a pu se voir assez vite. J’ai pu cerner un peu ce dont elle avait envie et j’avais ce projet de Elles dans les cartons dont le synopsis de base était écrit depuis peut-être un an.

A.S. : Ce qui m’a aussi frappé dans l’exercice de la BD, c’est ça. Kid dit que je varie beaucoup ce que je fais et justement, en BD, on fait de tout. On fait du character design, on développe un univers, des décors, on travaille les perspectives, on travaille la composition, la narration... C’est un exercice ultra complet que je trouvais super intéressant. Si ça se trouve, c’est là que je vais vraiment me sentir bien, en ayant un vrai pouvoir décisionnaire sur la création, beaucoup plus important que dans l’animation.


Kid, vous dites avoir changé votre façon d’écrire le scénario de cet album par rapport aux précédents...

K.T. : En règle générale je change tout le temps, à chaque série, voire à chaque album.  Ce qui est vrai, c’est que j’ai dû m’adapter au dessin d’Aveline même si c’est quasiment le cas pour chaque dessinateur. Pour Aveline en particulier, il y a eu un changement de format parce qu'Aveline est venue avec ses désirs de diva (rires)...

A.S. : Je ne voulais pas faire comme tout le monde, évidemment…

K.T. : Fallait que tu te démarques encore plus ! Il a fallu que je m’adapte à ce format-là un peu particulier, vous l’avez senti entre vos mains, il est complètement différent. J'étais parti pour faire un scénario comme je fais d’habitude avec un gros suspense, avec des ennemis, de l’action, et grâce à Aveline, je ne suis pas allé par là. Je me suis "auto-calmé" au fur et à mesure en me disant que je voulais juste rester avec cette bande de jeunes et mettre un suspense ailleurs que dans des rebondissements ou autres grosses ficelles de scénario.

Aveline, comment gérez-vous l'utilisation des flous et des perspectives ?

A.S. : C’est quelque chose que j’aime utiliser parce que j’aime les codes cinématographiques. Je trouve que c’est une manière d’immerger le lecteur d’une façon différente que dans les BD traditionnelles. Je travaille ça avec le digital. Quand je dessine, je peux trier mes calques, mes plans et je peux choisir de flouter ce qui est en arrière plan et donc de jongler ainsi avec la profondeur de champ et de mettre plus en avant le personnage quand j’ai envie de montrer davantage son visage ou son émotion. J’essaye de ne pas en abuser, de montrer quand-même des contextes et des décors, de m’en servir à bon escient.

La gestion de la lumière est également essentielle...

A.S. : La lumière, c’est un truc que j’adore travailler. Beaucoup de gens disent que c’est un de mes points forts, c’est quelque chose dont je ne peux pas passer à coté en faisant de la BD. En plus des flous de profondeur de champ, je voulais vraiment avoir ce travail de la lumière qui vient détacher les personnages du fond, qu’il y ait une ambiance, qu’on ait vraiment l’impression d’être dedans. Le travail des lumières et des émotions, ce sont vraiment deux facteurs auxquels j’accorde beaucoup d’importance. Je trouve que ça fait vraiment vivre les couleurs et l’histoire tout simplement.

En parlant de couleurs, on différencie aussi les différentes Elles grâce à l’expressivité des visages. Un plaisir ou un casse-tête ?

A.S. : C’est un casse-tête qui fait plaisir. Au départ, nous nous sommes posés la question de savoir comment on allait faire pour faire comprendre que c’est le même personnage. En dehors de la couleur des cheveux, il fallait une coiffure qui soit identifiable, pas trop banale non plus sans être extra, quelque chose entre les deux. J’ai aussi essayé de me servir des accessoires, le grain de beauté, le collier... C'était aussi un plaisir de pouvoir incarner le personnage avec différentes personnalités à travers des émotions. C’est sûr que ce n’était pas spécialement évident mais en le faisant ça paraissait naturel. Quand je dessine, c’est comme si j’incarnais moi-même mon perso et par exemple, quand il faut illustrer quelqu'un en colère, je suis moi même renfrognée devant ma planche en train de froncer les sourcils, c’est comme si ça transparaissait, ça transpirait de moi, à l’intérieur du perso (rires). Finalement, le défi n'était plus un défi, ça devenait naturel.

K.T. : C’est terrible parce que ce que tu dis là sur le dessin, on le ressent nous aussi pour les dialogues. Nous, les scénaristes, en général on joue les dialogues et on est très énervés parfois quand on retranscrit ça. Par rapport à Aveline et aux différentes Elles, ce qui est fabuleux, c’est de me dire que finalement la couleur de cheveux, c’est un gadget. Avec Aveline, on reconnaît quelle Elle parle à chaque fois. On parlait de ses lumières et je trouve que sur l’acting, le jeu des émotions, elle est extraordinaire, elle est fabuleuse. Quand on est scénariste, on a tendance à expliquer des expressions qui n’existent pas  on dit des demi émotions comme « elle est moitié surprise, moitié contente » ou « moitié étonnée, moitié triste »…

A.S. : « Elle est contente mais il y a un truc qui cloche, on sent que c’est pas un vrai sourire, c’est un sourire forcé tu vois ? On sent un malaise derrière son sourire. »

K.T. : Quand on explique ça en tant que scénariste, on a le dessinateur qui nous dit « ok, ça veut dire quoi ? » mais Aveline a compris à chaque fois et elle a réussi à le faire à chaque fois. C’est magique, vraiment.

A.S. : Je pense que c’est cette tendance que l’on a à pouvoir jouer nos personnages, se les approprier, ça aide énormément.

K.T. : Et ils existent vraiment quelque part dans ta tête, ils ont des expressions qui sont naturelles, pas juste un sourire ou des larmes, c’est parfois entre les deux. C’est super, je crois qu’on devrait faire un tome 2 (rires).

La couverture a-t-elle été choisie rapidement ?


A.S. : Il y a eu plusieurs versions. On ne savait pas trop sur quoi partir. Est-ce qu’on faisait une illustration plus de mise en contexte ou est-ce qu’on faisait une composition un peu comme on a fait finalement avec l’héroïne et ce qui gravite autour ? En terme de composition, on tâtonnait un petit peu. C’est pour celle-là qu’on a opté parce que finalement je pense que c’est la plus simple et la plus efficace.

K.T. : C’est toujours un combat une couverture parce que l’éditeur s’en mêle beaucoup; forcément. Au final, c’est Aveline qui a pris le guide. C’est elle qui a dit qu’elle avait son idée et qu’elle voulait la faire simple et ce faisant elle l’a faite super efficace et super classe. C’était parfait. On voit effectivement les cinq Elle avec cinq expressions de visage complètement différentes et là, de nouveau, on peut se passer des couleurs finalement.

A.S. : Quand-même, je trouve ça fun. C’est peut-être un accessoire visuellement, mais au cas où il y aurait des doutes, au moins on est rassurés, ça peut quand-même servir.

K.T. : Et ça fait chier les daltoniens aussi (rires).

Il y a quand-même des ambiances différentes suivant les personnages utilisés… Il n’y a pas que la couleur de la chevelure qui change.

A.S. : C’est vrai, ça dépend aussi de l’émotion qui est traversée. C’est sûr que dans les moments de doute, quand elle se questionne et qu’elle est un peu chiffonnée, mes ambiances lumineuses vont refléter ça aussi, il va faire plus gris, plus sombre. Il y a les codes couleurs des forteresses de solitude et c’est encore autre chose. Mais d’une manière générale, j’essaye de refléter dans la lumière les sentiments que les personnages traversent.

La première Elle que l’on voit, c’est la bleue qui pourtant n’est pas sur la couverture…

A.S. : Et pourtant ! Elle est sur la couverture ! (Rires) Mais extrêmement bien dissimulée... Mais il y a des gens qui l’ont vue, j’ai été vachement surprise de ça !

K.T. : Cela dit, scénaristiquement parlant, on a toujours vendu le fait qu’elle avait cinq personnalités et dès la première page on sait qu’elle en a six. On n'allait pas faire trainer un faux suspense comme ça, il fallait créer une tension dès le début et il fallait que cette personnalité apparaisse tôt. Mais la faire apparaitre clairement sur la couverture ça aurait été de trop.

A.S. : Oui, puis ça ne marchait pas au niveau du nombre.

K.T. : On n’aurait pas pu faire la composition en éventail. Avec le reflet, ça nous permettait de faire un twist en plus, c'était sympa.

A.S. : Pour ceux qui le voient !

K.T. : C’est bien d’avoir des petits bonus pour ceux qui sont plus attentifs que d’autres… Et je ne dis pas ça pour vous ! (Rires)

L’enchainement des deux premières planches est particulièrement réussi : un personnage solitaire, muet et énigmatique suivi d'une galerie d'autres personnages aussi bavards les uns que les autres... Le contraste est saisissant.


K.T. : C’est très bien vu.

A.S. : Au niveau du découpage, on travaille en ping-pong l’un avec l’autre. Kid me soumet souvent des découpages, il me propose des cadrages et on essaye toujours d’opter pour la solution qui convient le mieux. C’est chouette, c’est très souple à ce niveau-là. Si en le faisant je me rends compte qu’il y a quelque chose qui ne va pas et qui fonctionnerait mieux d’une autre façon, on en parle toujours et on adapte toujours pour que ça rende le mieux possible, pour que ce soit le plus cohérent au niveau de la narration.

K.T. : Ce que veut dire par là Aveline c’est que cette planche-là était très compliquée en fait ! (Rires)

A.S. : Aussi ! C’est vrai ! Celle-là était très compliquée parce que comme Kid adore parler et qu’il y avait énormément de choses qui s'y passent, ça a été un peu un casse-tête…

K.T. : C’est typiquement la planche où dans ma tête c’est très clair, il faut des plans rapprochés sur des personnages qui parlent les uns avec les autres et Elle qui arrive. Quand tu commences à mettre les dialogues il n’y a plus rien qui va !

A.S. : Il n’y a plus de place !

K.T. : C'était un apprentissage pour Aveline qui arrivait dans le milieu de la BD et qui devait placer du texte aussi…

A.S. : Dès la première page quoi !

K.T. : Après on a eu l’aide de Mollo Fernandez, le lettreur, qui a pu nous aider l’un et l’autre et qui à un moment donné nous a dit « là, ça passe pas ».

A.S. : Il a vraiment aidé à jongler avec le texte de la meilleure façon qu’il pouvait, il a vraiment fait un super travail, bien mieux que je n’aurais pu le faire. Parce que c’est tout un art de poser des bulles, l’air de rien…

K.T. : C’est bien parce qu’on avait une béquille, il y avait beaucoup de rebonds, comme le disait Aveline, entre nous. On s’est beaucoup aidés. Il faut rappeler que c’est le premier album pour Aveline parce qu’on ne dirait pas du tout. Il a fallu qu’elle apprenne plein de choses. Elle en a appris plein instinctivement toute seule et on a aussi été là pour l’aider un petit peu. Cette scène-là est typiquement la scène jouissive pour un scénariste où tout le monde parle en même temps et se coupe et où il faut que ce soit bien placé sinon le lecteur se perd tout de suite. C'était une planche abominable pour Aveline pour un début… Il y a juste cette première planche où il y a un personnage tout seul qui parle tout seul, tout allait bien, et après ça a été le contre-coup.

Autour de Elle, il y a aussi ces quatre personnages qui gravitent autour et qui la mettent en valeur. Comment les avez-vous créés ?


K.T.  : C’est une bonne question et on ne me la pose jamais. Je ne pourrais absolument pas vous répondre comment j’ai créé ces personnages-là. Ils naissent parfois tous seuls ex-nihilo et on ne sait pas trop comment ça arrive. Il y a une espèce de logique, de balance, d’équilibre entre les personnages. Il fallait des personnages drôles parce qu’on n’allait pas être dans l’introspection tout le temps. Je sais que je voulais qu’il y ait une meilleure amie qui soit un peu le point de vue du lecteur, c’est Maëlys. Après ça, il fallait un amoureux potentiel, Otis, et ensuite un binôme ultra drôle qui permet de couper un peu ces moments dramatiques. Line est un personnage que j’adore, elle fait partie de ces personnages qui m’échappent presque totalement. Je les trouve fabuleux, j'en suis amoureux, et j’oublie que je les ai créés en fait. Farid m’éclate complètement, il a la répartie juste quand il faut, j’adore sa façon de parler.

Il y a une enquête qui arrive assez tard dans le récit. Un thème venu après coup ?

K.T. : Ça prenait plus de place dans la version initiale. C'était une grosse enquête pour qu’il y ait un fil conducteur, que ce ne soient pas juste des scènes qui s’enchainent. Ça prenait déjà de la place au départ, et finalement j’ai élagué vachement cette intrigue, elle a toujours de l’importance, elle entre toujours dans la quête d’identité du personnage. Il y a une question qui est posée à la fin, il y aura des réponses dans les tomes 2 et 3 mais je ne suis plus parti trop loin dans cette intrigue-là. Ce n’est pas l’intrigue principale qui est la quête d’elle-même.


Vous parlez de deux ou trois tomes...


K.T. : Il y aura trois tomes avec la réponse finale à la fin du troisième tome. Ce serait compliqué d’en annoncer plus ou d’en annoncer moins. Ce sera moins seulement s’il ne se vend pas. Vous en avez acheté combien ??? (Rires).


A.S. : Ah non, moi je veux la résolution hein !

K.T. : Je te l’enverrai à toi par SMS !

Est-ce que vous avez l’habitude de travailler en musique ?

K.T. : Toujours en musique et généralement avec une playlist adaptée au projet. Toujours. D’ailleurs, Elles est née de deux chansons parce que j’écoute de la musique tout le temps quand je travaille.

A;S. : Moi ça dépend. Il y a des moments où j’aime le silence et d’autres où, pareil, je me plonge un peu dans un mood, quand j’ai un peu plus de mal à me remettre au travail.

K.T; : Ça m’arrive de commencer en musique, je lance une playlist mais je ne la mets pas en boucle et quand elle s’arrête je ne l’entends juste plus parce que je suis totalement dans le boulot.






Propos recueillis par L. Gianati et C. Gayout

Bibliographie sélective

Elles (Toussaint/Stokart)
1. La nouvelle(s)

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Magic 7
1. Jamais seuls

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