Été 1930, alors que la canicule s’abat sur Gyeongseong, Arisa Jo et Jun Seomoon ignorent encore que les différences qui les séparent pourraient rompre le subtil lien qui les unit…
Sorti il y a un peu plus d’un an, le premier volume de cette chronique de la Corée des années 1930 avait conquis par sa fraîcheur et sa spontanéité. Avec ce nouvel opus, Yudori, qui vit désormais en Angleterre, confirme son talent d’autrice en ancrant subtilement son récit dans l’ambivalence de l’adolescence, miroir des tensions d’un pays en recomposition. Sous une apparente insouciance, elle dépeint, en camaïeu, les états d’âme d’une nation tiraillée entre tradition et modernité, entre résistance et assimilation. Mais plutôt que d’aborder frontalement l’Histoire, elle choisit une approche allégorique à travers ses divers personnages. Chacun, à des degrés divers, est alors l'un des nombreux archétypes d’une société en profonde mutation, confrontée à l'occidentalisation du sud-est asiatique comme aux dictats de l'envahisseur nippon. Loin des grandes démonstrations, le ton employé est à la fois léger et profondément lucide ; il se révèle ainsi d’une maturité et d’une subtilité rares pour une scénariste de cet âge. Les Enfants de l’Empire offre dans ce tome 2 une réflexion tout en délicatesse, qui cultive le non-dit lorsqu'il il s’agit de l’éveil des sens, mais s’avère plus prolixe en matière de réveil des consciences.
Sur le plan graphique, ce nouveau volet séduira les amateurs de manhwa historique en respectant les codes du genre. Sobre dans sa mise en planche, sensuelle et élégante dans ses lignes, délicate dans son expressivité et d’une parfaite maîtrise dans sa mise en couleurs, Yudori propose un dessin empreint d'une forme d’harmonie et d’esthétisme qui se démarque de l’imaginaire collectif concernant un pan de l'histoire de la Corée marqué par un occupant opportunément absent !
Les Enfants de l’Empire, par la finesse de son graphisme et l’acuité de son scénario, pourrait bien installer Yudori, malgré elle, parmi les autrices de mangas (ou assimilés) de premier ordre, du moins en Europe...

















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