T
out le monde le savait, tout le monde s'en doutait mais cette fois, difficile de faire l'autruche. Le dérèglement climatique est à notre porte, comme ce méga-feu qui s'approche chaque jour un peu plus de la ville. Spectateur impuissant et distant de cette catastrophe, Léo a d'autres soucis, un boulot peu intéressant et une envie d'ailleurs. Pour Juliette, la donne est différente, l'état de sa maladie s'aggrave et sa main la fait de plus en plus souffrir, alors ce qu'il se passe aux portes de la ville, elle s'en fiche un peu. Deux êtres que rien ne prédestine à se croiser et qui pourtant semble rechercher la même chose : un refuge.
Pour sa première bande dessinée seule aux manettes, Cécile Guillard n'a pas choisi la facilité. En effet, l'artiste mêle introspection, fuite en avant, colère sourde à un cadre apocalyptique contemporain. De ce décor angoissant et étouffant, l'autrice brosse le portrait de deux êtres perdus dans une société qui ne leur ressemble plus. Errants au gré des vicissitudes de leurs existences à la dérive, les protagonistes décident de fuir cette ville asphyxiée pour retrouver leur souffle. Très expressif, le trait lâché de la dessinatrice prend, par moment, des allures impressionnistes pour peindre de superbes scènes lumineuses. Jouant sur les tons orangés, lors des couchers de soleil ou face à l'incendie gigantesque. Autant de scènes qui invitent à la contemplation.
Face à l'urgence de la catastrophe d'une part, et leur situation respective d'autre part, les deux héros semblent chercher comment s'en sortir sans trop savoir comment s'y prendre. Cette confusion se retrouve également dans une narration décousue. Si la mise en page impressionne, le propos, lui, semble moins maîtrisé. Critique de notre société ? Vacuité de nos existences ? Solitude des êtres dans un environnement pourtant surpeuplé ? Besoin de réconciliation avec la nature ? Sûrement un peu de tout cela à la fois.
Poétique et splendide, ce Refuge est également parfois hermétique. Une fable moderne qui laisse dubitatif autant qu'elle interpelle, au moins pour le talent graphique de Cécile Guillard.
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