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smaila vit à Gunjur en Gambie, où une usine transforme la pêche locale en farine destinée à l’exportation depuis 2016. Les prises se font plus rares, son père, pêcheur artisanal, est obligé de s’endetter pour continuer à vivre et l’environnement se dégrade suite aux pollutions de l’eau et de l’air. Cette situation est déjà catastrophique, et les choses vont empirer avec les pressions exercées par son oncle qui, lui, travaille pour la multinationale et fait pression sur la famille pour céder à l’appel de l’industrie.
Dans la veine de précédents livres de Jean-Denis Pendanx (L’œil du marabout, Au bout du fleuve), le récit s’appuie sur un séjour sur place des auteurs. S’il s’agit d’une fiction, elle décrit toutefois ce qu’il se passe réellement dans ce village. Chaque personnage permet d’aborder un aspect du sujet sans que cela soit forcé ou artificiel. Le récit est très riche (santé et accès au soin, endettement, écologie, pêche, coutumes, amitié, accès à l’éducation…) et réussit à les incarner dans ses personnages. Et surtout, Laurent Galandon parvient à faire vivre tous les seconds rôles, même ceux qui n’apparaissent que sur quelques planches, ce qui renforce l’immersion et donne l’impression de comprendre la vie du village dans toute sa complexité. Les choix des uns et des autres sont très bien amenés, sans manichéisme. Le héros hésite à s’investir dans les luttes écologiques de son amie, l’oncle est à la fois aidant et malveillant envers leur famille… Et une fois les décisions prises, leurs conséquences sont toujours contrastées.
Comme dans ses BD précédentes, graphiquement le trait de Jean-Denis Pendanx est à la hauteur. Les ambiances d’Afrique de l’ouest sont très bien rendues, notamment via un beau travail sur les couleurs et la lumière. Les scènes de nuit et les quelques passages sous-marins sont magnifiques. La mise en scène des gaz rejetés par l’usine, qui est particulièrement difficile à représenter par nature, est rendue très palpable dans plusieurs scènes.
Traitant le même sujet que les deux BD On a mangé la mer et Pillages, cet ouvrage apporte une nouvelle dimension aux enjeux de la surpêche et de l’exportation en creusant leurs impacts sur les habitants. Ici pas de vulgarisation scientifique, uniquement le vécu d’une famille gambienne qui vit en plein cœur de cette problématique. En cela, ce livre est une grande réussite.
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