Ma chère, ma fidèle, ma tendre amie,
Que ce soit de Giacomo Girolamo Casanova ou de Monsieur le vicomte de Valmont, il est en cet être des deux ! De petite noblesse, mais souhaitant accéder à la plus haute, le Chevalier de Saint Sauveur, car c’est de lui qu’il est ici question, sait faire état d’un esprit aussi machiavélique que dépourvu de scrupules pour œuvrer à ses noirs desseins. Si la cause de tels agissements demeure encore mystérieuse, ce n'est – oserais-je dire – qu’un juste retour des choses que de le voir, après avoir semé l’opprobre et le désespoir sur cette pauvre oie blanche qu’est Madame de Clairefont, tomber à son tour de Charybde en Scylla.
La parution de ses écrits, chez les éditions Delcourt sises rue Neuve-Sanson, est pour l’heure le fait des Sieurs Alain Ayroles et Richard Guérineau qui agissent de concert dans un essai qui bénéficie d’un format en facilitant un usage plaisant. Vous apprécierez, Madame, que ce premier volume de L'Ombre des Lumières fasse l’objet des plus grands soins dans sa manufacture : l’ensemble se veut soigné, capitonné à la toile de Jouy, calligraphié « à l’ancienne » afin, probablement, de mieux plonger le lecteur en des lieux où la nuance entre le dernier degré de l’élégance et le premier de la noblesse faiblissait devant les intrigues vénales et malfaisantes d'une telle engeance.
Il ne vous échappera pas, en fine connaisseuse de la chose littéraire que, pour l’occasion, Monsieur Ayroles emprunte les manières de notre illustre Choderlos de Laclos. Oserons-nous nous en offusquer dans la mesure où ces prétendus échanges épistolaires sur l’œuvre d’une vie et sur les mœurs de notre temps se trouvent aussi bien écrits que fort adroitement illustrés ? Qu’il me soit loisible d’éviter de vous narrer telle ou telle parties de l’histoire, ce qui viendrait à déflorer l’intrigue, mais que cela puisse piquer votre curiosité et vous inciter à vous pencher sur cette prose dessinée qui, si elle porte le discrédit sur un homme et son siècle, n’en demeure pas moins sujet à réflexion, à commencer par cet intéressant discours sur « Le consentement à la servitude et sur le bienfondé des hiérarchies ».
Chère âme, qu’il nous soit permis, lors de notre prochaine rencontre dans l’ombre de votre ruelle... de nous inspirer longuement de quelques passages de cet "Ennemi du genre humain" !
Votre dévoué servant...
Intrigue entierement previsible, dialogues scintillantes, dessin sympa au coloriage gai. Je m'attendais a beaucoup plus.
Je suis assez mitigé sur cette bande dessinée. Annoncée comme l'évènement de cette rentrée (au même titre que l'avait été "les Indes fourbes"du même Ayroles ), je me suis donc précipité sur cet album, dans sa version en noir et blanc.
Si la première partie rend parfaitement hommage (même un peu trop) aux "liaisons dangereuses" de Choderlos de Laclos, à tel point que j'avais deviné la chute dès les toutes premières pages, la seconde partie m'a quelque peu désarçonnée. Je croyais suivre les aventures d'un libertin au sein de la cour de Louis XV, et nous sommes rapidement plongé dans des intrigues liées aux tribus du "Nouveau monde", où notre divin chevalier Saint Sauveur se retrouvera en mauvaise posture.
Mais ce qui m'a dérangé le plus, c'est la forme narrative épistolaire choisie. J'ai du parfois revenir en arrière pour savoir qui parlait ou à qui s'adressait la lettre, tant j'ai trouvé peu d'adéquation entre les épistoliers et les pages censées illustrer la lettre.
Par contre, Richard Guérinaud, avec ici un univers très éloigné des" stryges", tire parfaitement son épingle du jeu: personnages, costumes et décors, tout est parfait.
L'intrigue étant prévue en 3 volumes, j'espère que le tome 2 me réconciliera avec cette série que j'attendais beaucoup