Comme une grande

U n entretien d’embauche, c’est toujours stressant. Qu’est-ce qui se cache derrière les questions du responsable des RH ? Que répondre ? Être honnête ou sortir quelques propos génériques glanés sur des sites de conseil en recrutement ? Chez Marie, l’interrogatoire a l’effet de la replonger dans son passé. Quels incidents de vie ont eu des influences sur son cheminement personnel  ? Comment est-elle arrivée là ?

Première œuvre intimiste, Comme une grande raconte l’enfance et, surtout, l’adolescence d’une milléniale d’aujourd’hui. Les petites joies et les malheurs du quotidien, les épreuves (le divorce de ses parents), les copines et l’école. Puis, plus sérieux et dramatique, surtout quand on est une romantique comme elle, les premières amours et les fractures qui apparaissent avec ceux et celles qui étaient des composantes de son univers jusqu’alors. Classique récit initiatique sur le temps qui passe, l’album est raconté avec ce qu’il faut de fraîcheur et d’honnêteté. L’autrice a certainement puisé une bonne partie de son inspiration dans son propre vécu insufflant ainsi réalisme et incarnation à la narration. Pour accompagner le tout, quelques notes d’humour (les mots d’enfant et les hormones bouillonnantes sont de bons déclencheurs) ponctuent ces pages douces-amères, sans rien cacher des blessures intérieures de l’héroïne.

Visuellement, l’approche très lâchée à la frontière de la maladresse rend cette trajectoire de vie cahoteuse, voire guère engageante. N’est pas Bastien Vivès qui veut. La spontanéité et le lâcher-prise graphique n’est pas aussi facile qu’il en a l’air. Cela dit, la dessinatrice possède un sens certain du découpage et de la mise en scène. Résultat, malgré les hésitations, l’ouvrage tient la route sur la longueur.

Insuffisamment maîtrisé dans sa facture, Comme une grande offre un moment de lecture à fleur de peau très intense et, surtout, d’une franchise impressionnante. Grandir, se sentir différent(e), douter, tout le monde passe par ces étapes. Maëlle Réat résume et synthétise ces inquiétudes universelles et les retranscrit, certes un peu maladroitement, avec une réelle sincérité.