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ous sommes en 1905, Ned et Zed sont deux tueurs professionnels du Middle West. Zed passe son temps à tout compter : nombre de balles tirées, nombre de poutres qui soutiennent une charpente, etc. Son copain Ned est pire encore, il a des problèmes existentiels qui l'empêchent de tuer depuis au moins quatre mois. Ils accompagnent Magic Child, une indienne (mais peut-être pas), qui les a engagés pour retrouver Miss Holy Dolly Hawkline, sa sœur disparue. Il est aussi de plus en plus question d'un monstre étrange, le Big Foot, le premier homme selon les indiens. Plus ils approchent de leur but, plus les traces du monstre et de la sœur semblent se confondrent. Quelle embrouille !
Le premier tome de l'adaptation du roman de Richard Brautigan par Nicolas Dumontheuil avait surpris par le ton complètement loufoque de western décalé. A mille lieues du bon classique de "La dernière séance" du mardi soir familial. Que pouvait présenter de mieux le deuxième volet ? Pas grand-chose, si ce n'est l'absence de déception à la lecture d'un album intermédiaire entre un début sur les chapeaux de roues et une fin que tous espèrent en apothéose. "Holly Dolly" est bien plus qu'un passage entre l'entrée et la sortie d'une œuvre pour faire "marrer les copains". C'est l'heure de la révélation et de la libération pour Ned, enfin soulagé de comprendre sa réalité, des retrouvailles pour deux sœurs étrangement semblables et du départ pour Zed. Plus qu'une promesse, c'est l'introduction à une conclusion grandiose et imprévisible pour qui n'a pas lu Le monstre des Hawkline. Rien ne laisse présager que le classique, le commun, le déjà-vu seront au rendez-vous, bien au contraire. Le tome 2 destructure complètement tout ce qui fut lors de l'album précédent : la création d'une équipe, la peur d'un monstre, la recherche d'une femme nourrissant tous les désirs, … Bref tout se disloque et c'est bien ainsi.
Et le tout dans un délire graphique débridé d'un Dumontheuil au sommet de son art ! Les paysages torturés et les personnages malmenés entre le bien et le mal, l'humour et la détresse ou la beauté et la laideur. Selon l'ambiance, le trait se fait caricatural, tordant les visages, chargeant les haleines et les odeurs. Pouah ! On sentirait presque les effluves de chique, celle du ragoût de mouton rotée ou celle des morts faisandés. Seul le talent permet de faire ressentir tout cela sans l'évoquer. Tous les protagonistes sont rendus beaux tant ils paraissent vrais. Même si certains font rire, ou pleurer et d'autres font pitié, leur physique joue un rôle primordial destiné à forger leur caractère. Lorsque c'est un des éléments essentiels et que c'est si merveilleusement rendu, on peut raisonnablement penser être en présence d'une œuvre majeure. Et les couleurs d'Isabelle Merlet, qui sont à l'image des grands espaces américains et des défilés coupe-gorge, ne font que renforcer cette impression.
Big Foot n'a rien à envier aux plus grands westerns, au cinéma comme en bande dessinée. Il suffit juste d'accepter une certaine dose de délire débridé comme vecteur d'émotions et la jubilation est au rendez-vous.
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Merci Isabelle Merlet pour cette mise en couleur sans laquelle BIG FOOT ne serait pas totalement BIG FOOT. On sent la poussière, la sueur, le crin de cheval, la poudre, l'alcool frelaté, le cuir, les haricots rouges, la chique de tabac, le bois brûlé, la toile enduite, bref ... ça sent le Western.
Si le premier tome de Big Foot m'avais charmé et passionné par son humour décalé, très "brautiganien", de fait, on passe vraiment aux choses sérieuses avec ce second, qui se révèle complexe, fascinant, voire bouleversant dans ses toutes dernières pages. Sans trahir les codes éternels du western (duels au pistolet et tout le tintouin), mais en les distordant et les enrichissant de multiples déviations "post-modernes", Dumontheuil nous propose au final une lecture "psychanalytique" terrible des rapports filiaux comme des passions amoureuses (… et sexuelles bien sûr). Tour à tour parodie subtile, thriller efficace et parabole cruelle, "Holly Dolly" nous emporte en riant dans un galop effréné au fond de notre inconscient le plus noir, sans pour autant négliger de pointer ce qui a fait l'essence d'une nation "composite" comme les Etats-Unis, le mélange et l'affrontement violent des races et des cultures. Avouons-le, on n'en attendait pas tant de "Big Foot" !
Aventure, humour, superbes cadrages, scénario haletant, ...
Bigfoot est à mon sens une des Bd les plus divertissantes qu'il m'est amené de lire.
C'est carrément drôle en plus, et sans essoufflement.
Le style Dumontheuil n'a pas fini de nous étonner !!
Dans la lignée du premier tome. Très bon donc.
Scénario dense